Natural Born Killer : Nature versus Culture
Dans un monde entièrement fictif, où les consciences ont été remplacées par le flux continu des images médiatiques, alors que la vie n’est plus que matière à nourrir l’ogre télévisuel, Mickey rencontre Mallory, Mallory rencontre Mickey. Et ils surent que c’était Vrai !
Enfants de cette frénésie qui les entoure et les dévore de l’intérieur, ils cherchent confusément un moyen de retrouver ce sens du Vrai, du Réel, du Concret. Ce moyen, ce sera la tuerie de masse, un retour à un état animal, à l’arbitraire amoral qui régit la nature.
Cette solution reste cependant purement réactive et les maintient à l’intérieur du système social épileptique qu’ils cherchent à fuir. Devenus les monstres qu’ils souhaitaient combattre, ils se retrouvent perdus. Le refuge qu’ils vont alors trouver auprès d’un vieil indien qui entreprend de les désintoxiquer permettra leur rédemption. Et leur chute nécessaire ne fera qu’annoncer leur renaissance dans la pureté originelle de la violence et du sang. Tout un programme !
Avec ce film, Oliver Stone et Quentin Tarantino proposent leur version de l’opposition, un peu manichéenne mais fondatrice pour la mythologie américaine, entre la société, corrompue et corruptrice, et la nature, pure et rédemptrice. Ce thème, manifestement très fécond, a permis, ici encore (comme avec « La ligne rouge », par exemple), à ses créateurs de se surpasser pour atteindre à un morceau d’universel.
Le scénario, composé de différentes strates de réalité, ainsi que de va et viens dans le temps, les personnages absolument parfaits et incarnés par un casting génial, entre le flic pervers, le journaliste égocentrique, le directeur de prison sur le fil, les parents plus vrais que nature, …, la réalisation vertigineuse et hypnotique, la bande-son habitée ; tout semble concourir dans ce film pour aboutir à une œuvre riche, foisonnante, qu’on redécouvre perpétuellement, un point d’orgue de ce que l’industrie du cinéma peut offrir à nos petits yeux avides.